360° : Vision de l'invité d'honneur - Agora du Supply Chain Management

La blockchain est un sujet vaste. Comment l’avez-vous circonscrit durant la soirée ?

Marc Durand :Le but fut de faire un bref rappel sur les concepts de la blockchain. Il existe beaucoup d’informations sur le sujet et les confusions sont courantes entre crypto-monnaies et usages de la blockchain en termes d’applications pour l’industrie. Il était question de mettre en avant les grandes notions qui caractérisent la blockchain : celles notamment de registre partagé suite à un consensus entre les acteurs et de sécurité liée à la cryptographie.

Quelles sont les concrétisations de cette technologie ?

M.D :La deuxième partie de mon intervention fut tournée vers les orientations concrètes.
Je voulais distinguer plusieurs cas d’usages. J’ai donc évoqué trois sujets en développement qui sont des illustrations du potentiel de la blockchain.

L’exemple de Maersk, grand armateur de porte-conteneurs, travaillant notamment avec IBM sur le sujet du Global Trade. L’objectif de ce projet d’envergure mondiale est de digitaliser l’ensemble des processus sous-jacents au commerce international qui impliquent l’ensemble des acteurs : de la banque exportatrice à la banque importatrice en passant par les acteurs logistiques, les opérateurs maritimes, les autorités portuaires et douanières, etc. Au total, une centaine d’acteurs est déjà mobilisée sur l’utilisation de cette plateforme mondiale sécurisée et qui connait depuis son lancement une croissance quotidienne d’1 million de transactions en termes de mouvements de conteneurs.

Deuxième exemple avec Everledger spécialisé dans les opérations/ transactions dans le marché du diamant. La blockchain est ici mobilisée pour garantir la traçabilité pour l’ensemble du cycle de vie des diamants, de leur extraction à la mise sur le marché. Cycle de vie d’ailleurs extrêmement réglementé en termes de compliance. Pour aller plus loin, le diamant se distingue car ses molécules possèdent les mêmes caractéristiques physiques d’un ADN, ce qui permet une traçabilité inédite avec la blockchain. C’est un projet qui suit aujourd’hui plus de 3 millions de diamants.

Troisième exemple avec Walmart et la blockchain appliquée à la supply chain dans la chaîne alimentaire, du producteur jusqu’au consommateur final. L’idée est donc d’assurer une traçabilité fiable et la plus complète possible. Dans un écosystème de type consortium avec des acteurs comme Unilever et Nestlé, Walmart a comme premier objectif d’identifier à la source et le plus rapidement possible le problème en cas d’empoisonnement.

Quelles méthodes de travail pour innover avec la blockchain en R&D ?

M.D :Ce sont des méthodes agiles qui s’appliquent et quand on réalise un PoC (Proof of Concept), il importe de mettre en place un planning court. Par exemple, je fonctionne sur des projets qui se tiennent sur un maximum d’une douzaine de semaines pour fournir un premier livrable opérationnel. Il faut donc utiliser une méthodologie agile (Design Thinking, itérations courtes, etc.) pour supprimer l’effet tunnel des projets traditionnels.
Enfin, pour appréhender la blockchain, il faut cultiver une approche de type « bottom-up » :
Il ne faut pas penser la blockchain pour la blockchain et la considérer comme la solution miracle. Au contraire, il faut partir d’un problème métier qui n’est pas (ou très mal) adressé par les technologies existantes et se demander « si » puis « en quoi » la blockchain peut résoudre ce problème métier.

Une question posée pendant la soirée sur laquelle revenir ?

M.D :On m’a fait la remarque que les exemples concernaient essentiellement des géants tels que Maersk ou Walmart. Se posait donc la question de la scalabilité pour les plus petites entreprises. Mais j’ai tenu à préciser que la blockchain est un problème de business network, et qu’elle peut s’appliquer à toute taille d’entreprise dans son écosystème propre.

Propos recueillis par Geoffroy Framery